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Chlordécone, scandale colonial, sanitaire et environnemental...

Les parties civiles du procès du chlordécone et de nombreuxEs militantEs de l’écologie décoloniale se sont rassembléEs mardi 22 octobre devant la Cour d’appel de Paris pour une nouvelle audience procédurale sur la possibilité d’attaquer l’État francais en responsabilité.

Des militantEs et des associations antillaises comme « Gaoulé pou dépolié Matinik », le COAADEP (Collectif des ouvriers agricoles de la Martinique) se sont rassemblés devant la Cour de justice de Paris avec Lilith, membre de COAADEP, le collectif Vietnam Dioxine ou encore Malcom Ferdinand, militant, chercheur spécialiste sur la question du chlordécone et partie civile dans le procès, historique en France, du chlordécone.

La pollution des terres et des corps en Martinique et en Guadeloupe

Le chlordécone est un pesticide hautement toxique utilisé pour lutter contre le charançon du bananier aux Antilles par l’État français. Il a été totalement interdit en 2009 par la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants.

Malgré son interdiction en France métropolitaine dès 1990, les planteurs de bananes ont exercé une forte pression pour obtenir une dérogation leur permettant de continuer à utiliser le pesticide jusqu’en 1993. Selon eux, il n’existait pas d’alternative efficace, un argument contesté par la suite. Un rapport de 2005 de l’Assemblée nationale française révèle qu’après l’interdiction, le pesticide a été introduit clandestinement dans les îles sous le nom de Curlone. Son usage a perduré pendant de nombreuses années.

En raison d’une grave contamination des sols par le chlordécone, les autorités locales en Guadeloupe et Martinique ont depuis 2003 imposé des restrictions sur la culture de certaines plantes vivrières. 95 % des habitantEs de la Guadeloupe et 92 % de ceux de la Martinique sont exposéEs à ce pesticide. La Guadeloupe présente l’un des taux les plus élevés de diagnostics de cancer de la prostate au monde.

Faire reconnaître la responsabilité de l’État français

Le 14 mars 2024, l’Assemblée nationale française a assumé la responsabilité de la ­contamination par le chlordécone affectant les populations de Martinique et de Guadeloupe. Pour autant, la dernière décision de justice, en janvier 2023, avait rendu un non-lieu. Car, avant 1998, administrer une substance que l’on savait mortelle suffisait à caractériser un crime d’empoisonnement. Avec l’affaire du sang contaminé, la Cour de cassation a introduit une nouvelle exigence : « l’intention de tuer ». Or, cette interprétation a été appliquée dans l’affaire du chlordécone. Les avocatEs des parties civiles estiment que cette condition, introduite par le juge et non par le législateur, va à l’encontre de la Constitution. Iels ont donc déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui permet de vérifier si une loi respecte la Constitution. Une autre QPC déposée concerne la possibilité de poursuivre l’État au pénal. 

Des débats à huis clos

Le 22 octobre, ces deux questions étaient examinées par la Cour d’appel de Paris. Les débats ont eu lieu à huis clos, sans que les parties civiles soient autorisées à entrer. « Je trouve que c’est inadmissible. [...] On a affaire à une justice qui se fait sans les AntillaisEs, qui se fait hors des Antilles, qui se fait à huis clos », déplore Malcom Ferdinand qui regrette que le procès soit ­délocalisé à Paris.

Au détriment des terres et des corps, le gouvernement français, colonial et polluant, a laissé les planteurs empoisonner les Antilles. C’est ce qu’on appelle le racisme environnemental. La véritable lutte écologique doit impérativement être décoloniale. 

La justice rendra sa décision le 13 novembre prochain. « Nous ne nous tairons plus ! Notre dignité n’est pas négociable ! », scandaient les militantEs, devant le tribunal.

Amel

Le reportage vidéo du 22 octobre :
https://youtu.be/vWWUDdg-vbw?si=h2Ifiub1DzDWIwH9

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