L’assassinat de Charlie Kirk aux États-Unis (lire page 4) a eu des retentissements politiques et médiatiques en France. L’extrême droite — du Rassemblement national (RN) aux groupuscules, jusqu’à leurs médias — en fait un prétexte pour hâter l’application de son agenda politique, via des opérations de victimisation et d’instrumentalisation.
Des personnalités comme Thaïs d’Escufon ou Damien Rieu en ont profité pour porter un discours selon lequel seraient menacées aussi bien la civilisation « blanche », la « liberté d’expression » que les personnes de « droite » (l’extrême droite ayant toujours du mal à s’assumer comme telle), mettant en scène leur inquiétude. Des groupuscules ont organisé des rassemblements en hommage à l’influenceur américain, comme à Nice où une centaine de nervis fascistes se sont réunis devant le monument aux morts, arborant des drapeaux français, chantant La Marseillaise — le tout relayé par Frontières. Le collectif des « Natifs » a organisé un rassemblement d’une dizaine de personnes devant l’ambassade des États-Unis à Paris. Le « comité Trump France » a annoncé qu’un rassemblement d’hommage était en cours de préparation.
Le RN à l’offensive
Le RN a, dans un premier temps, été relativement discret sur l’assassinat, Bardella se contentant d’attaquer la gauche, qui serait responsable de la « violence politique ». Mais, ce week-end, l’offensive a pris de l’ampleur. Tout d’abord, lors du meeting du RN à Bordeaux, Louis Aliot, maire de Perpignan, a fait applaudir Charlie Kirk par 7 000 personnes, en faisant le parallèle avec la tuerie de Charlie Hebdo. Plus grave encore, trois députés apparentés RN mais proches d’Identité Liberté (le mouvement politique de Marion Maréchal-Le Pen) ont écrit une lettre pour interpeller Retailleau, dans laquelle ils demandent une protection pour les « lanceurs d’alerte » (en citant nommément Damien Rieu, Marguerite Stern, Alice Cordier ou encore certains « journalistes » de Frontières) : une protection policière, mais aussi l’« autorisation du port d’une arme de poing », au nom de la liberté d’expression.
Porosité entre l’extrême droite et les médias grand public
La manière dont les médias français ont traité l’assassinat de Kirk montre une porosité entre l’agenda d’extrême droite et les médias grand public, y compris dans le service public. Par exemple, sur France Culture, lors de la matinale du vendredi 12 septembre, l’édito s’intitulait « Je suis Charlie Kirk ». Dans le Figaro, on a pu lire une tribune signée Mathieu Bock-Côté intitulée « Le retour de la violence en politique » pour parler de l’assassinat. Les médias Bolloré ont utilisé cet événement pour justifier comme jamais des revendications sécuritaires.
Les personnalités d’extrême droite ont défilé sur les plateaux pour témoigner de menaces de mort et de leur sentiment d’insécurité, en accusant la gauche de vouloir assassiner ses opposants politiques. Toute la sphère d’extrême droite a lié l’assassinat de Charlie Kirk avec les manifestations anti-immigration qui se déroulent depuis plusieurs semaines en Angleterre. Ces démonstrations racistes ont d’ores et déjà rassemblé une centaine de milliers de personnes le week-end dernier — des figures françaises comme Éric Zemmour ou Jean Messiha ayant même fait le déplacement.
Empêcher l’extrême droite de prendre la rue
L’extrême droite avance ses cartes : l’insécurité explose à cause de la gauche et de l’immigration, il faut donc se défendre. Si le RN reste prudent, l’écosystème d’extrême droite est très offensif. Son rêve est qu’une guerre civile éclate, par la mise en mouvement des franges les plus radicalisées de l’extrême droite et des mouvances complotistes sur des mots d’ordre racistes, sécuritaires et nationalistes. Nous devons prendre à bras-le-corps ces questions et empêcher la mobilisation de l’extrême droite dans nos rues.
LM