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Actualités nationales... - Page 2

  • Stop à la répression syndicale et du mouvement social ! Solidarité avec Ana !

    La vague de répression syndicale, orchestrée par les politiques répressives et pro-patronales du gouvernement d’Emmanuel Macron, frappe désormais une militante de la CGT, Ana Fernandez, dans le Loir-et-Cher. Loin d’être anecdotique, il s’agit d’un cas d’école de répression syndicale. Soyons solidaires d’Ana Fernandez !

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  • Agression antisémite du rabbin d’Orléans : Unité contre tous les racismes !

    Le NPA-l’Anticapitaliste s'associe nationalement au communiqué du NPA-l’Anticapitaliste du Loiret (45). Nous apportons toute notre solidarité au rabbin d'Orléans victime d'une agression antisémite et appelons à développer la lutte contre toutes les formes de racisme. L'ampleur et le dynamisme des manifestations antiracistes du 22 mars doivent être des points d'appui.

    Le NPA-l’Anticapitaliste 45 tient à apporter son soutien au rabbin d’Orléans suite à son agression, et affirme sa solidarité avec ses proches ainsi que toutes les personnes juives.

    Depuis la profanation de la plaque d’Olga Koch à Beaune-la-Rolande à l’incendie criminel contre la mosquée de Jargeau ; en passant par les propos racistes réguliers de Serge Grouard, les conférences de France Souveraineté, la négrophobie subie par Alphonse Kimberley au sein de l’US Orléans ou les stigmatisations des voyageurs chaque année lors du rassemblement de Nevoy ; un vent mauvais souffle sur le Loiret.

    Pour le NPA-l’Anticapitaliste 45, la lutte contre le racisme ne se divise pas.

    C’est pourquoi nous appelons à la mobilisation contre toutes les formes de racisme, dont l’antisémitisme et l’islamophobie, dans le prolongement de la belle manifestation unitaire du 22 mars.

    Il y a urgence à se mobiliser dans l’unité pour faire entendre un autre discours, celui de l’égalité des droits, de la justice. Celui d’un monde sans exploitation ni oppression

  • La chasse aux immigré·es : l’obsession du gouvernement...

    À peine un an après le vote de la dernière loi immigration, deux nouvelles mesures viennent de passer aux conséquences dramatiques pour les étrangères et les étrangers.

    Depuis fin janvier, c’est d’abord une circulaire prise par Retailleau qui vient durcir les conditions de régularisation des personnes sans-papiers. Alors que les possibilités de régularisation étaient déjà fortement réduites par la loi Darmanin, la circulaire fait passer de 3 à 7 ans la durée de présence minimale nécessaire pour déposer une demande et ajoute d’autres critères comme l’absence d’une précédente mesure d’obligation de quitter le territoire français (ce qui relève de l’exploit après sept années) ou la connaissance de la langue française. Les préfectures devront également évaluer le degré « d’intégration ». L’application de ces directives permettra de refuser net l’enregistrement des milliers de demandes qui relèvent pourtant déjà du régime de l’admission exceptionnelle au séjour — soit d’une procédure dérogatoire et arbitraire.

    Restriction du droit du sol

    Le 6 février, c’est un projet de loi proposée par les Républicains (LR) sur la restriction du droit du sol à Mayotte qui a été voté à l’assemblée, quelques semaines après que le cyclone Chido a dévasté une grande partie de l’île. Depuis 2018, le droit du sol s’applique déjà de manière restreinte à Mayotte. L’enfant qui souhaitait la nationalité française devait prouver que l’un de ses parents vivait sur le territoire français de manière régulière au moins trois mois avant sa naissance. Désormais, ce sont les deux parents qui devront prouver une résidence régulière et minimale de trois ans avant la naissance de l’enfant. Cela revient, de fait, a pratiquement abroger le droit du sol, comme Macron souhaitait le faire par révision constitutionnelle, projet finalement abandonné. L’application de cette loi ne fera que renforcer la détresse de milliers de jeunes qui ne pourront jamais sortir de la clandestinité.

    Logique coloniale et raciste

    La logique raciste et colonialiste qui prévaut à Mayotte sur l’accès à la nationalité française et qui y crée des « étrangers » est un véritable cheval de Troie de l’extrême droite depuis des années. Car au-delà de Mayotte et des départements colonisés, c’est le principe même du droit du sol qui est maintenant remis en cause par le gouvernement, en premier lieu par Darmanin, Retailleau et Valls. La fin de l’automaticité du droit du sol à 18 ans était déjà présente dans le projet de loi immigration amendé par le Sénat. C’était alors la première fois que cela était envisagé depuis Vichy. Avec la remise en cause du droit du sol, et comme cela était prévisible, les propositions censurées par le Conseil constitutionnel en décembre 2023 reviennent aujourd’hui à l’assemblée : la suppression du titre de séjour pour les étrangers malades, le rétablissement du délit de séjour irrégulier, le conditionnement des prestations sociales à deux années de résidence régulière et même au-delà. Darmanin a annoncé vouloir interdire le mariage de personnes en situation irrégulière. Pour compléter le tableau, Bayrou veut proposer un grand débat sur « l’identité française ». Il s’agit bien d’une accélération raciste qui se déroule depuis la rentrée, seul moyen de survie du gouvernement. 

    Contre cette banalisation et surenchère raciste, nous devons construire la riposte et aux côtés des sans-papiers, des exilé·es et des étrangères et étrangers, la régularisation et la carte de plein droit, l’ouverture des guichets, pour la libre circulation et d’installation de toutes et tous ! 

    Louisa D.

  • L’actualité du Manifeste communiste...

    Cet article est issu d’une soirée du Centre d’études marxistes. Ces réunions visent à la fois un objectif d’autoformation et de réflexion critiques. Elles empruntent donc beaucoup à des travaux préexistants de camarades issu·es ou non de notre courant.

    Pourquoi lire, relire et débattre de ce texte de 1848 ? Il est le produit d’un endroit, l’Europe, et d’une époque, le 19e siècle, dans lesquels se développent le capitalisme et un mouvement ouvrier très divers. Il y a des traits communs en ce début du 21e siècle : l’absence de projet politique émancipateur porté par les masses, et l’éclatement des salarié·es, des organisations ouvrières. 

    Ce qui permet à ce court texte de garder dans ses grands traits une force et une actualité remarquables, c’est qu’il expose dans un style clair et flamboyant une nouvelle conception du monde, « le matérialisme conséquent étendu à la vie sociale, la dialectique, science la plus vaste et la plus profonde de l’évolution, la théorie de la lutte des classes et du rôle révolutionnaire dévolu dans l’histoire mondiale au prolétariat, créateur d’une société nouvelle, la société communiste »1 qui démontre sa pertinence pour comprendre la domination bourgeoise, les moyens d’agir pour construire une société émancipée, débarrassée de l’exploitation et des oppressions.

    Un apport fondamental

    Il est parfaitement résumé par Engels dans la préface à l’édition de 1883, écrite après la disparition de Marx : « L’idée fondamentale et directrice du Manifeste, à savoir que la production économique et la structure sociale de chaque époque historique qui en résulte nécessairement, forment la base de l’histoire politique et intellectuelle de cette époque ; que, par suite [...], toute l’histoire a été une histoire de luttes de classes, de luttes entre classes exploitées et classes exploitantes, entre classes dominées et classes dominantes, [...] mais que cette lutte a actuellement atteint une étape où la classe exploitée et opprimée (le prolétariat) ne peut plus se libérer de la classe qui l’exploite et l’opprime (la bourgeoisie), sans libérer en même temps et à tout jamais la société entière de l’exploitation, de l’oppression et des luttes de classes ; cette idée maîtresse appartient uniquement et exclusivement à Marx »2

    Les conséquences de cet apport sont considérables. Les classes sociales en lutte ne sont pas des institutions sociales « permanentes ». Elles sont le produit à chaque étape déterminée du développement économique, des modalités de la répartition des richesses et des formes de l’affrontement entre les classes. Tant la classe exploitée et opprimée que la bourgeoisie connaissent des évolutions, des ruptures.

    Les rapports sociaux en révolution constante 

    La bourgeoisie est le produit d’un long développement. Née au Moyen Âge, elle s’est développée sous la féodalité et dans quelques pays dont la France dans la colonisation, la traite négrière. Elle continue de se modifier en permanence car elle « ne peut exister sans révolutionner constamment les instruments de production, ce qui veut dire les rapports de production, donc l’ensemble des rapports sociaux »3. D’où l’importance de l’analyse concrète de chaque situation. 

    Les débats actuels entre les différentes options capitalistes, la compétition entre les secteurs aux intérêts parfois opposés montrent l’actualité de cette approche matérialiste des classes sociales. La bourgeoisie qui domine le monde est bien autre chose qu’une somme de patrons et l’exploitation économique. C’est une puissance sociale qui organise la production, qui est en dernière analyse le produit de toute la société, et de ce fait domine, structure l’ensemble des relations sociales et l’impact de la société sur la nature

    Les Hommes et les femmes font leur propre histoire

    Affirmer qu’il n’existe pas d’essence humaine en dehors des rapports sociaux a des conséquences majeures. Les hommes et les femmes d’une période donnée, les formes de l’exploitation, des oppressions, l’histoire politique, les luttes, sont les produits des rapports sociaux.

    Dès lors que la société produit l’être humain, elle est en retour produite par son action ; les luttes, les révoltes des exploité·es et des opprimé·es modifient ces rapports sociaux. Par leur action, les hommes et les femmes font donc leur propre histoire. 

    Non pas que la révolution soit en tout temps et tout lieu possible. Mais rien n’est inéluctable. Dans chaque situation il n’y a jamais une seule possibilité : le processus historique concret dépend des luttes des dominé·es, de leur conscience collective, de leur organisation.

    La libération de chacun·e est la condition de la libération de toutes et tous

    Comme l’histoire n’est pas écrite à l’avance, il est possible de se débarrasser de l’exploitation et de l’aliénation en sortant du capitalisme dans lequel le travail vivant ne sert qu’à augmenter les richesses des possédants, il est possible de construire une société dans laquelle « le travail accumulé n’est qu’un moyen d’enrichir et de promouvoir le processus vital des travailleurs »4. Pour cela il faut abolir la propriété privée, car elle est l’appropriation de l’essence humaine. Lorsque Marx se déclare communiste dans les Manuscrits de 1844, il exprime magnifiquement cette idée force : « l’abolition positive de la propriété privée, l’appropriation de la vie humaine, signifie donc la suppression positive de toute aliénation, par conséquent le retour de l’homme hors de la religion, de la famille, de l’État, etc., à son existence humaine, c’est-à-dire sociale »5. Il y a bien, pour construire une société émancipée, un lien entre l’abolition de la propriété privée et la suppression de l’aliénation. 

    Il est frappant de voir à quel point le bilan des révolutions du 20e siècle le confirme. La propriété privée capitaliste a été abolie en Russie, en Chine, sans instauration du socialisme. Il ne suffit donc pas de prendre le pouvoir, de nationaliser les moyens de production pour produire mécaniquement une société émancipée. La transformation révolutionnaire de la société impose d’autres modifications, par la démocratie, l’auto-émancipation, pour instaurer une « association où le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous »6, définition toujours pertinente du monde que nous voulons construire.

    L’action communiste

    Mais pour abolir la propriété privée existante, en finir avec la bourgeoisie, il faut plus que des idées, il faut une action communiste.  

    Le prolétariat, la classe des exploité·es et des opprimé·es est potentiellement révolutionnaire, exprime le mouvement de l’immense majorité dans l’intérêt de l’immense majorité, mais elle n’est pas mécaniquement victorieuse. Selon le Manifeste, « le premier pas dans la révolution ouvrière est la constitution du prolétariat en classe dominante »7

    D’où la présentation du rôle des communistes qui « ne forment pas un parti distinct opposé aux autres partis ouvriers […] n’ont point d’intérêts qui les séparent de l’ensemble du prolétariat […] n’établissent pas de principes particuliers sur lesquels ils voudraient modeler le mouvement ouvrier »8, ils ne se distinguent qu’en faisant valoir les intérêts du prolétariat mondial, du mouvement dans sa totalité. 

    Marx et Engels combattent les sectes, ces courants qui ont comme raison d’être, non ce qu’ils ont de commun avec le mouvement, mais les « principes particuliers » qui les distinguent. En 1848, la Ligue des communistes est une fraction qui doit stimuler les autres. Lors de la fondation de la première Internationale en 1864, il n’existe plus d’organisation communiste, ils y militent sans organisation spécifique et combattent les sectes en son sein.

    Le Manifeste n’aborde pas la question cruciale du processus de construction de la conscience de classe, la conscience communiste, et laisse entendre qu’elle se produit naturellement. Ce point sera complété magistralement par Lénine, 54 ans plus tard, dans Que Faire qui précise le rôle des communistes : « La conscience politique de classe ne peut être apportée à l’ouvrier que de l’extérieur, c’est-à-dire de l’extérieur de la lutte économique, de l’extérieur de la sphère des rapports entre ouvriers et patrons. Le seul domaine où l’on pourrait puiser cette connaissance est celui des rapports de toutes les classes et couches de la population avec l’État et le gouvernement, le domaine des rapports de toutes les classes entre elles »9.

    La prise de pouvoir politique pour arracher le capital à la bourgeoisie

    Le mode de domination capitaliste ne peut être renversé que par une révolution qui érige le prolétariat en classe dominante, et l’émancipation économique s’obtient par la conquête du pouvoir politique. Mais cela passe-t-il par la prise du pouvoir d’État existant ? 

    La Commune de Paris en 1871 va tout modifier. Dès le 12 avril 1871, Marx écrit « la prochaine tentative de la révolution en France devra consister non plus à faire passer la machine bureaucratique et militaire en d’autres mains, comme ce fut le cas jusqu’ici, mais à la détruire. C’est la condition première de toute révolution véritablement populaire sur le continent »10, position qu’il détaillera ensuite en affirmant que la forme politique de la Commune est susceptible d’extension.

    Postérité et limites

    Si les principes généraux du Manifeste gardent toute leur pertinence, dès les préfaces des éditions suivantes, Marx et Engels pointent les points qu’il faudrait revoir, logiquement, leur application dépendant des circonstances historiques. Cependant deux aspects nécessitent une réévaluation.

    La victoire inéluctable du Prolétariat ?

    Le Manifeste est péremptoire : « le développement de la grande industrie sape, sous les pieds de la bourgeoisie, le terrain même sur lequel elle a établi son système de production et d’appropriation. Avant tout, la bourgeoisie produit ses propres fossoyeurs. Sa chute et la victoire du prolétariat sont également inévitables »11. Cette idée que la victoire inévitable d’un prolétariat toujours plus nombreux avec des partis et des syndicats de plus en plus forts était omniprésente.

    Force est de constater que l’accroissement numérique du prolétariat à l’échelle mondiale ne se traduit pas automatiquement par une augmentation de la conscience collective et le mouvement ouvrier ne connaît pas une progression linéaire. Déjà la trahison de la Deuxième Internationale à l’entrée de la Première Guerre mondiale avait été un choc pour tous les marxistes révolutionnaires, et Rosa Luxembourg avançait dès 1915 une idée révolutionnaire : « socialisme ou barbarie »12. Un siècle après, avec les crises écologiques, cette notion prend une autre ampleur qui valide l’expression reprise par Michael Löwy : la révolution est le frein d’urgence13.

    La domestication de la nature ?

    Les formules du Manifeste sur la domestication des forces de la nature, l’utilisation de la chimie dans l’industrie et l’agriculture montrent que l’époque n’est pas à la prise en compte des dégâts du productivisme. Ce culte du progrès dominant dans différentes variantes socialistes et staliniennes du marxisme tout au long du 20e siècle oublie que les forces productives ne sont pas neutres. 

    Pourtant les Manuscrits de 1844 de Marx développent l’idée que la rupture radicale de l’unité entre l’être humain et la nature est à l’origine de la vie aliénée moderne, d’où l’expression de « l’idée émancipatrice de la réunification de l’humanité et de la nature sous la forme humanisme = naturalisme »14.

    A partir de 1865-66, il découvre les problèmes de l’épuisement des sols, et la rupture métabolique entre les sociétés humaines et la nature, ce qui l’amène à écrire : « chaque progrès de l’agriculture capitaliste est un progrès non seulement dans l’art d’exploiter le travailleur, mais encore dans l’art de dépouiller le sol ; [...] La production capitaliste ne développe donc la technique et la combinaison du procès de production sociale qu’en sapant en même temps les deux sources d’où jaillit toute richesse : la terre et le travailleur »15. Le progrès peut donc être destructif, l’exploitation et l’abaissement des travailleurs et de la nature résultent d’une même logique prédatrice. Cette sensibilité ne donne pas à Marx une perspective écologique d’ensemble, mais corrige les excès de la théorie du progrès.

    En guise de conclusion provisoire

    Dans une période historique où il est plus fréquent de parler de fin du monde que de fin du capitalisme, où les questions de tactique politique, voire politicienne, dominent, où la déstructuration de collectifs ouvriers et des organisations du mouvement ouvrier du 20e siècle pose la question centrale de la constitution de la classe des exploité·es et des opprimé·es en classe consciente de son rôle émancipateur, la lecture, relecture de ce texte fondamental est une véritable source d’inspiration. 

    Agir en gardant l’objectif de libérer la société toute entière de l’exploitation des oppressions donne à nos combats aux côtés des exploité·es et des opprimé·es une autre ampleur de vue, la seule qui permet d’augmenter la lucidité et donc les chances de succès.

    Patrick Le Moal

    • 1. Lénine
    • 2. K. Marx et F. Engels, Manifeste du parti communiste. Éd. Sociales, 2023, p. 105.
    • 3. Idem, p. 55.
    • 4. Idem, p. 70.
    • 5. K. Marx, Manuscrits de 1844. Éd Flammarion, 2021. 
    • 6. K. Marx et F. Engels, ibid., p. 78.
    • 7. Idem, p. 76.
    • 8. Idem, p. 67.
    • 9. Lénine, Que faire ? 1905.
    • 10. Lettre du 12 avril 1871 de Marx à Kugelmann 
    • 11. K. Marx et F. Engels, ibid., p. 67.  
    • 12. R. Luxembourg, La crise de la social-démocratie, plus connu sous le nom de Brochure de Junius, 1915.
    • 13. M. Löwy, La révolution est le frein d’urgence : Essais sur Walter Benjamin. Éd. de l’éclat, 2019.
    • 14. K. Saïto, La nature contre le capital. Éd. Syllepse, 2016.
    • 15. K. Marx, Le Capital Livre I. 1867.
  • Affaire Angelo Garand, l’impunité à l’échelle européenne...

    En 2017, Angelo Garand, un homme de 37 ans issu de la communauté des gens du voyage, est abattu par les gendarmes du GIGN à Seur, dans le Loir-et-Cher. La récente décision de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), rendue le 6 mars 2025, démontre l’alignement de cette institution avec l’État français dans le maintien de l’impunité policière.

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  • Le Manifeste, un texte vivant !

    Cet article est issu d’une soirée du Centre d’études marxistes. Ces réunions visent à la fois un objectif d’autoformation et de réflexion critiques. Elles empruntent donc beaucoup à des travaux préexistants de camarades issu·es ou non de notre courant.

    Le Manifeste du parti communiste, rédigé à la veille de la révolution de 1848, est l’œuvre de Marx (et d’Engels, même si son rôle est moindre) la plus célèbre et la plus diffusée dans le monde. En dépit de sa notoriété, ce bref texte n’a rien d’un traité de théorie politique à vocation universelle. Pourtant son souffle révolutionnaire porte ce texte au-delà de son temps et c’est précisément parce qu’il est né de circonstances singulières qu’il continue de s’adresser à nous.

    Pour éclairer ce paradoxe, il importe de revenir tout d’abord sur les conditions de la rédaction du Manifeste, avant d’en venir à deux de ses thèmes centraux : d’abord la question de la lutte de classe et du « parti », ensuite celle de la réappropriation communiste. Car le communisme, pour Marx dès cette époque, ne désigne pas un projet clé en main mais un effort long, pour renverser toute domination de classe, se réapproprier nos activités sociales et bâtir un autre monde. « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » : c’est sur cet appel à la mobilisation qu’il se clôt, qui n’a jamais été aussi urgent qu’aujourd’hui. 

    Le prélude à la révolution de 1848

    À la veille de 1848, l’Allemagne est morcelée. Marx est né en Rhénanie, où les armées de la Convention imposèrent pour un temps le droit révolutionnaire, avant son annexion par la Prusse, État féodal et policier, à l’occasion du Congrès de Vienne. Dans cette région rurale mais marquée par un relatif développement économique et par des inégalités croissantes, la contestation apparaît tôt.

    Ainsi, en 1832 à Hambach, non loin de Trèves, sa ville natale, un rassemblement politique réunit près de 30 000 personnes pendant deux jours. On y revendique la liberté de culte, une Constitution, l’unité allemande et certains participants osent même évoquer une prochaine révolution armée. En 1835, le poète Georg Büchner rédige le premier manifeste de la révolution sociale en Allemagne, lançant le mot d’ordre fameux : « paix aux chaumières, guerre aux palais ! ». C’est aussi dans cette culture allemande rebelle que s’enracine le Manifeste.

    Tandis que ces soulèvements populaires sont tous violemment réprimés par le pouvoir prussien, une presse critique émerge progressivement, porteuse des intérêts libéraux mais aussi d’aspirations démocratiques. Marx, devenu proche des mouvances contestataires d’obédience hégélienne, va s’impliquer en 1842 (à 24 ans) dans ce journalisme d’enquête et d’opinion, accédant très vite un rôle dirigeant au sein de la Gazette rhénane.

    En 1843, après l’interdiction de la Gazette rhénane par le pouvoir prussien, Marx rompt avec un camp libéral qui ne fut jamais le sien et qui s’est révélé incapable de s’opposer à la censure. Il s’exile à Paris, capitale de la révolution non sans avoir rédigé auparavant un grand nombre de travaux, dont une critique détaillée de la conception hégélienne de l’État. 

    À Paris, il fait la rencontre d’Engels, qui se revendique depuis longtemps du socialisme. Horrifié par ses orientations politiques, son père l’a envoyé à Manchester dans l’une des filatures dont il est propriétaire. Mais là-bas, son expérience du monde industriel (ainsi que sa rencontre avec Moses Hess) le conduit à se revendiquer, avant Marx, du communisme. Le terme, sans être clairement défini, désigne avant tout le rejet de la propriété privée dans un contexte de débats intenses autour des options socialistes, communistes et anarchistes qui se répandent en Europe. 

    Pour sa part, Engels est surtout marqué par les grèves qui, lors de la crise économique de 1842, avaient rassemblé plusieurs millions d’ouvriers anglais, ces contradictions étant selon lui vouées à déboucher sur la révolution sociale. Apparu à la fin des années 1830, le chartisme constitue en effet la première organisation de masse en Europe, alors que les partis politiques modernes n’existent pas. L’option de Marx est d’emblée un peu différente : il considère que la révolution sociale doit aussi être une révolution politique et plus encore une révolution de la politique, à l’encontre de sa confiscation sous la forme d’un État séparé, retourné contre les travailleurs. 

    Dans ce contexte, Marx conçoit la montée des idées révolutionnaires comme le résultat de contradictions historiques dont elles ne sont cependant jamais le simple reflet : elles peuvent dans certains cas contribuer à inventer et à orienter l’avenir, tout en étant déterminées par les circonstances présentes. Le Manifeste se veut un texte d’intervention, qui vise à transformer conjointement et l’un par l’autre le savoir et l’action. D’où l’optimisme extrême de ce texte flamboyant : à l’orée du soulèvement européen de 1848, tout semble possible !

    Ce texte militant n’en est pas moins un grand texte théorique et prospectif : le terme de communisme nomme avant tout une invention collective permanente, qui vise à restituer aux êtres humains la maîtrise de leur vie sociale et individuelle et non une utopie. Marx a identifié le prolétariat comme le principal acteur de la révolution à venir, qui, en s’alliant aux autres exploité·es, abattra les restes du féodalisme en même temps que le capitalisme en formation, ultime forme de la domination de classe, centré sur la dépossession radicale des travailleurs.

    Le Manifeste se fait l’écho de toutes les contradictions de son temps. Lors du Congrès de Vienne de 1815, les grandes puissances ont redessiné la carte de l’Europe et celle du monde. Mais cette Europe redécoupée disperse les peuples et les écrase, attisant à la fois les revendications de libération nationale et de justice sociale. Sur le plan mondial, l’Occident impose sa domination au reste du monde alors que le capitalisme entame son expansion planétaire : le Manifeste anticipe sur ce processus de mondialisation. La colonisation et l’esclavage lié au commerce triangulaire constituent la conséquence de sa lente émergence, mais ils accélèrent en retour son essor. Et la crise en cours est aussi économique, devenue périodique en dépit de l’essor de la production.

    L’instabilité de cet édifice est sans précédent : à partir de 1830, les vagues révolutionnaires se succèdent à travers le monde et le Manifeste, qui souhaite accélérer et accompagner le processus révolutionnaire, se propose de fournir une analyse historique cohérente de cette réalité et de ses contradictions. Car ce sont ces contradictions qui ouvrent des brèches dans l’histoire et esquissent des possibilités inédites d’émancipation collective. Mais à la condition de les comprendre et d’agir en leur sein, de façon résolue, consciente et organisée. En dépit de toute la distance qui nous sépare de cette époque, cette tâche est plus que jamais actuelle : elle se nomme lutte de classes

    Lutte de classes et parti de classe

    Dans le Manifeste, la lutte de classe est centrale, motrice et ses premières lignes sont restées fameuses : « L’histoire de toute société jusqu’à nos jours est l’histoire de luttes de classes ». Les classes sont non des entités immuables mais le produit de cette lutte, constante, contradictoire. Mais elles sont aussi fonction de la place des groupes sociaux au sein de la production des richesses. Enfin, elles se caractérisent par des formes de conscience plus ou moins élaborées, qui rendent possible la construction de leurs intérêts propres en tant que forces politiques. Avec qui s’unir, comment et jusqu’à quel point, dans quel but ? Ces questions politiques et stratégiques traversent de part en part ce texte. 

    Dans ce monde en mutation d’avant 1848, la colère des populations confrontées aux injustices et à la misère croît depuis longtemps. Cette longue fermentation de la révolte a donné naissance à des courants politiques contestataires, en voie de modernisation. Leurs buts sont distincts sans être forcément incompatibles : le courant libéral revendique une Constitution associée à un système parlementaire censitaire tandis que la tendance démocrate en appelle à une république octroyant des droits politiques plus larges. De son côté, une mouvance égalitaire radicale, issue du babouvisme, appelle à la révolution sociale. 

    La Ligue des Justes appartient à cette dernière mouvance. Lorsque Marx et Engels s’en rapprochent, celle-ci existe depuis plus de dix ans et regroupe des artisans et des ouvriers allemands émigrés, organisés en Suisse, à Paris et à Londres. À Paris, la Ligue a participé à l’insurrection blanquiste de mai 1839 et elle a subi la violente répression qui a suivi son échec. De son côté, le groupe suisse est dirigé par Wilhelm Weitling, adepte d’un communisme d’inspiration chrétienne et babouviste, peu soucieux de rigueur théorique mais partisan charismatique de la voie insurrectionnelle. Quant aux dirigeants londoniens de la Ligue, ils défendent une ligne moins offensive et souhaitent avant tout transformer l’organisation secrète initiale en formation légale. Pour Marx et Engels cet objectif est parfaitement compatible avec une option ouvertement révolutionnaire.

    Engels rappellera par la suite que la condition qui avait été mise par Marx et lui-même à leur participation : la suppression « du culte superstitieux des autorités ». Ainsi leur victoire est-elle avant tout stratégique, démocratisant le fonctionnement interne de la Ligue en imposant l’instance décisionnelle du congrès. Fermant la voie à toute « velléité de conspiration », cette forme d’organisation est désormais « absolument démocratique » dira Engels, imposant le statut de dirigeants élus et révocables. Elle « transformait la Ligue, du moins pour les temps de paix ordinaires, en une simple société de propagande ». 

    En vertu de ce but, une telle structure reste très éloignée des partis modernes et notamment des organisations puissantes de la social-démocratie allemande et autrichienne de la fin du 19e siècle. La Ligue des Justes, rebaptisée Ligue des Communistes, reste une petite formation rassemblant surtout des intellectuels et des artisans- ouvriers, éloignés des prolétaires industriels. Pourtant, elle constitue bien l’embryon d’une organisation nouvelle, ouverte et internationale, qui se met au service du combat spécifiquement politique de la classe ouvrière.

    Lorsque la révolution éclate le rôle de la Ligue et plus généralement de ceux qui se réclament du communisme est peu important. À la suite de l’échec de la révolution, la répression va s’abattre violemment et durablement sur les militants et les organisations ouvrières. En revanche les questions posées par Marx et Engels demeurent et elles expliquent que le Manifeste, d’abord peu diffusé, connaisse ensuite une diffusion de masse : qu’est-ce qu’une organisation révolutionnaire ? Quel est son rôle ? Quelles sont ses structures ?  

    Dans le Manifeste, les communistes sont « la fraction la plus consciente des partis ouvriers ». En 1850 et après la trahison des partis démocrates, Marx optera pour la formation d’organisations autonomes de la classe ouvrière. Mais jamais ni lui ni Engels n’envisageront en doctrinaires les questions tactiques et stratégiques. Jamais ils ne cultiveront le fétichisme de l’organisation. Le but final prime sur les outils de la lutte même si de tels moyens — des organisations structurées — sont à leurs yeux indispensables. Il y existe non une science mais un « art stratégique », comme l’a si fortement dit Daniel Bensaïd. 

    Le communisme, pour se réapproprier nos vies

    La grande modernité du Manifeste, en dépit de son caractère par endroits daté, se trouve dans la perspective de la réappropriation, qui dépasse de loin la seule disparition de la grande propriété. Cette thèse, propre à Marx, traverse toute son œuvre. 

    D’une part, il ne se contente pas d’annoncer la révolution ou de l’appeler de ses vœux, il souligne la nécessité de l’action politique, au sens neuf du terme, ainsi que l’importance décisive que revêt la prise de conscience, comme condition de la victoire des classes dominées. Or cette prise de conscience passe par la réappropriation d’un savoir, monopolisé par les classes dominantes et produit à son usage, formaté par ses préoccupations économiques, sociales et politiques. 

    D’autre part, Marx s’était depuis longtemps employé à une critique de l’État en tant qu’instance séparée, scindée de la vie économique et sociale : c’est la gestion collective qu’il confisque. Marx va passer de l’idée de sa conquête à celle de son « bris », au profit d’un « pouvoir public », autogouvernement démocratique dont la Commune de Paris lui fournira l’esquisse. Car conquérir l’État c’est bien souvent être conquis par sa logique : la terrible histoire ultérieure du « communisme » en témoigne...

    En ce même sens, le communiste concerne la transformation en profondeur de l’ensemble des activités sociales et non la simple répartition égalitaire des richesses produites : il s’agit d’engager un processus de réappropriation de fonctions dont le capitalisme opère le détournement au profit des classes dominantes. Cette réappropriation est un but, mais elle est aussi une condition majeure de la révolution si on conçoit celle-ci non comme un « grand soir » mais comme un processus lent et complexe, comme la réorganisation collective et rationnelle de toute la vie économique et sociale. Autrement dit, c’est tout de suite qu’il s’agit de se ré-emparer de sa vie et c’est tout l’enjeu, immédiat, des luttes et des mobilisations pour enclencher cette construction difficile. 

    À cette occasion, Marx énonce une autre thèse majeure, inséparable de ce qui précède et qui place le communisme aux antipodes de tout collectivisme de caserne : il s’agit de construire « une association dans laquelle le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous ». Se réapproprier nos activités sociales contre la privatisation capitaliste du monde, c’est aussi se réapproprier nos vies, notre temps libre, condition de notre émancipation personnelle, confisqués et saccagés par un capitalisme plus féroce que jamais. Le Manifeste précise la définition donnée en 1845 dans l’Idéologie allemande : « le communisme n’est pour nous ni un état qui doit être créé, ni un idéal sur lequel la réalité devra se régler. Nous appelons communisme le mouvement réel qui abolit l’état actuel. Les conditions de ce mouvement résultent des prémisses actuellement existantes ».

    Ce communisme de la réappropriation va bien au-delà d’une simple redistribution. Il consiste dans la refonte des rapports sociaux de production et de reproduction, il porte sur la vie même, en y incluant la nature. La grande actualité du Manifeste est là : ces questions sont à la fois des buts et des leviers de la lutte et de la mobilisation anticapitaliste. Se battre contre l’exploitation, le sexisme, le racisme et toutes les dominations de classe en leurs mille variantes, c’est se battre pour nous, chacun·e et ensemble, en esquissant dès maintenant la figure d’un monde meilleur. Et nos organisations doivent désormais être vraiment à la hauteur de ces buts.  Décidément, le Manifeste, texte vivant et inclassable, foudroyant, est à lire et à relire. 

    Isabelle Garo

    * Isabelle Garo, philosophe, marxiste, est l’autrice de Communisme et Stratégie (éditions Amsterdam, 2019) ainsi que de nombreux ouvrages sur Marx, et récemment d’une riche introduction de la nouvelle édition du Manifeste du Parti communiste aux éditions Sociales, également préfacée par Éric Vuillard. Cette édition reprend une bonne traduction du Manifeste.

  • Abolir le capitalisme sans prendre le pouvoir politique ?

    Le livre de Bernard Friot et Bernard Vasseur Le communisme qui vient1 ouvre le débat sur  les conquêtes sociales et leurs représentations dans notre imaginaire collectif. Au-delà des avantages qu’elles représentent, il nous parait nécessaire de discuter fraternellement avec les auteurs des portées symboliques qu’ils leur donnent.

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  • Souscription : Et maintenant, les travaux !

    Après quelques semaines de négociation, le NPA-l’Anticapitaliste s’est mis d’accord sur un prix pour acquérir le bâtiment qu’il occupe avec son imprimerie Rotographie depuis 1976. Une promesse de vente devrait être signée avant la pause estivale. 

    L’achat ne fait donc plus guère de doute ! Un immense merci à toutes et tous pour votre soutien qui nous a permis de récolter pas loin de 500 000 euros à la date d’aujourd’hui. 

    C’est évidemment une première étape majeure. Mais le plus dur reste à faire : concrétiser notre projet de rassembler toutes les activités internes et externes du NPA-l’Anticapitaliste dans un lieu ouvert et utile au mouvement.

    Cela passe d’abord par une reconfiguration du rez-de-chaussée afin d’accueillir notre librairie « La Brèche » et créer un espace ouvert au public pour se réunir et boire un verre. La conception des travaux nécessaires est en cours et une mise en œuvre est espérée pour l’année 2026. Toutefois, un tel projet a un coût très élevé. 

    Tout comme pour l’achat du bâtiment, nous voulons éviter le recours à un emprunt bancaire. D’abord car ce recours n’a rien d’automatique, mais aussi car nous n’avons pas envie d’engraisser une banque !

    Le meilleur moyen de financer un tel projet est donc de s’appuyer sur nos propres forces, c’est-à-dire toutes celles et ceux qui pensent que le NPA-l’Anticapitaliste est une organisation utile pour notre camp social. Si vous n’avez pas déjà versé un don fin 2024 (et même si… !), nous faisons appel à vous !

    Commission Souscription