Le conclave des cardinaux a élu pour la première fois un pape américain, un homme qui a critiqué la politique du président Donald Trump et du vice-président J.D. Vance. Que signifie pour l’Amérique le choix de cet Américain à la tête de l’Église catholique ?
Actualités internationales...
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Que signifie un pape américain pour l’Amérique ?
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Palestine, Gaza, la Nakba s’intensifie. Que notre solidarité aussi !
Les chiffres de victimes à Gaza ont disparu de l’actualité alors que les morts ne cessent de s’amonceler. Les unEs s’habituent ou sont depuis le départ indifférentEs. Les autres savent que ces informations seules ne peuvent plus transformer l’opinion publique, et encore moins l’action des dirigeants complices.
Rien ne semble pouvoir y faire, malgré 50 000 morts déjà au bas mot, des dizaines de milliers de blesséEs, des familles entières disparues, des hôpitaux détruits et une population déplacée à maintes reprises, affamée, terrorisée, broyée. Ce scandale des scandales ne fait plus événement. Pourtant, le pire est peut-être encore devant nous.
Le maximum de terres avec le minimum d’Arabes
Le gouvernement israélien, à l’initiative du sinistre Smotrich, a récemment endossé une stratégie explicite de conquête coloniale intégrale de Gaza. Ce plan prévoit la destruction complète de Gaza, l’annexion du territoire, l’installation de colonies et l’expulsion massive des PalestinienNEs. Un projet qui relève du nettoyage ethnique pur et simple au sens du droit international, de la déportation massive. Ce projet assumé s’inscrit dans la continuité coloniale du sionisme, fondé sur l’appropriation exclusive de la terre. À quelques jours du 15 mai, la journée de la Nakba, ce plan Smotrich fait écho au plan Daleth qui a orchestré la catastrophe de 1948, avec son lot de massacres, de spoliations et de déplacements forcés, pour nettoyer la zone. De 1948 à 2025, l’objectif est le même : réduire la présence palestinienne du fleuve à la mer.
La famine comme préparatif de l’épuration
La famine organisée est l’instrument de ce plan. Depuis plus de deux mois, plus rien ne rentre à Gaza. Jamais le blocus n’a été aussi impitoyable. Les convois d’aide humanitaire, d’alimentation sont systématiquement bloqués ou bombardés ; les terres agricoles rendues infertiles par les frappes ; les boulangeries et les infrastructures civiles réduites en poussière. Gaza est désormais en proie à une crise humanitaire planifiée. Pour la première fois, on craint le délitement de la société civile gazaouie sous la pression des pénuries. Il s’agit d’une entreprise de déshumanisation méthodique visant à briser jusqu’à la possibilité de résistance. L’objectif n’est pas dissimulé : il s’agit de rendre la vie impossible pour forcer l’exode, d’affamer pour pousser à fuir.
Ici, enfumage et répression
Pendant ce temps, en France, la parole est confisquée. Les voix anticolonialistes sont systématiquement marginalisées. Les soutiens de l’État colonial israélien ont libre antenne, tribunes libres, micros ouverts. À droite, ce sont les apologistes du génocide qui s’expriment à volonté. À gauche, ce sont les voix torturées qui ont la parole, pour dire sur quatre colonnes leur infinie tristesse des dégâts humains tout en défendant Israël et son « droit à se défendre ». Pour mettre au centre du débat la faillite morale d’Israël, pour éviter de parler de structure d’oppression, avec la pseudo-solution à deux États pour éviter d’exiger des droits concrets comme l’égalité des droits et le droit au retour. On pleure une tragédie pour parler de tout sauf de décolonisation et de sanctions pour mettre un coup d’arrêt à l’horreur.
Au lieu d’un sursaut face à la réalité du génocide et à la proclamation ouverte et revendiquée du projet de nettoyage ethnique, les autorités françaises accentuent encore la répression de la solidarité. Après la dissolution de Palestine Vaincra, le projet de dissolution d’Urgence Palestine, les nombreuses procédures pour « apologie du terrorisme », le vote en faveur de la proposition de loi sur l’université visant à museler les mobilisations étudiantes et les voix critiques, tout traduit la volonté de faire taire le soutien au peuple palestinien.
Soutenir le peuple palestinien, c’est refuser le fascisme ici et là-bas
Dans ce contexte, les mobilisations prévues à l’occasion de la journée de la Nakba prennent une importance particulière. Le 17 mai sera un test de résistance face à la fascisation en cours. Il faudra être nombreuxEs, visibles, déterminéEs. Notre devoir est d’enrayer cette machine de mort. D’affirmer que soutenir le peuple palestinien, c’est refuser le fascisme ici et là-bas. De refuser qu’un projet de nettoyage ethnique triomphe dans l’indifférence.
Olivier Lek-Lafferrière
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Palestine : Le monde se souviendra de ces tout petits linceuls alignés...
L’Anticapitaliste publie encore et toujours ce texte lu en manifestation pour ne pas oublier Gaza.
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L’Europe prise au piège de l’axe Trump-Poutine...
Cette résolution du Conseil national du Bloc de Gauche portugais sur la politique internationale, approuvée le 23 mars 2025, voit « l’Europe prise au piège de l’axe Trump-Poutine » et soutient que « l’impérialisme américain reste le plus agressif et constitue une superpuissance avec laquelle d’autres puissances impérialistes cherchent à combiner l’existence de pôles mondiaux », un processus qui « avance, tantôt par le conflit, tantôt par la coopération entre puissances et par l’intégration capitaliste transnationale ». Pour le Bloc de Gauche, il existe divers impérialismes et « aucun d’entre eux n’aura un rôle progressiste car tous agissent selon les intérêts de leurs élites capitalistes ». Par conséquent, « reconnaître cette réalité est vital pour élaborer une proposition internationaliste capable d’offrir un avenir à l’humanité et de concevoir un ordre démocratique des peuples. »
Nous publions intégralement la résolution approuvée le 23 mars par le Conseil national du Bloc de Gauche sur la situation européenne et internationale, marquée par le retour de l’extrême droite à la présidence des États-Unis d’Amérique. Cet article a été publié initialement par Europe solidaire sans frontière (ESSF), traduit par Adam Novak.
1. Une seule loi, celle de la force
La seconde élection de Donald Trump à la Maison Blanche a déclenché des changements significatifs dans l’ordre mondial. La conscience du déclin ou de la dissolution de diverses institutions internationales issues des accords d’après-Seconde Guerre mondiale est rapidement devenue généralisée. Les Nations unies, fréquemment paralysées dans le passé par les vetos des États-Unis, de la Russie ou de la Chine au Conseil de sécurité, sont aujourd’hui ouvertement méprisées. Les États-Unis d’Amérique et leur bras israélien, ou la Fédération de Russie et son actuel bras nord-coréen, font des menaces répétées à l’existence même de l’ONU. Ce sont exactement les mêmes États responsables de violations continues des normes de la Charte qui interdisent l’usage offensif de la force. Des agences comme l’Organisation mondiale de la Santé ou l’UNESCO sont sous le feu de l’extrême droite internationale. L’Organisation mondiale du commerce, enfoncée par de nouvelles protections douanières, est dans un coma induit par les États-Unis, sous protestation... de la Chine. Seul le Fonds monétaire international, extension organique de Washington, police du dollar comme monnaie standard et surveillant des économies endettées, est resté jusqu’à présent indemne, même s’il est déguisé en agence de l’ONU.
2. Retrait de l’OTAN, orphelinat européen
Les gouvernements et l’opinion publique d’Europe occidentale ont réagi avec stupeur à la collaboration entre Trump et Poutine. En relativement peu de temps, Trump a enterré l’article 5 du traité de l’Atlantique Nord, désengageant les États-Unis de toute action militaire en cas d’agression contre l’un de ses membres. Il est devenu évident que l’OTAN n’a jamais été une protection. Trump a choisi l’Arabie saoudite comme siège diplomatique de son partenariat avec Poutine : cet éternel vassal des États-Unis croise également la route de la Russie au sein des BRICS, en plus de chercher à sauvegarder la production d’hydrocarbures et d’enterrer définitivement les accords de Paris. Au-delà du partage de l’Ukraine, la Maison Blanche et le Kremlin annoncent une sorte de traité de Tordesillas dans l’Arctique.
Les élites européennes se sentent orphelines. Plus que la soi-disant régulation internationale (à la destruction de laquelle elles ont directement contribué il y a quelques mois, en ignorant les mandats contre Netanyahou émis par la CPI), elles regrettent l’ombre du parapluie nucléaire des États-Unis.
3. Charte des Nations Unies — lettre morte
Les élites européennes pleurent ce moment comme l’agonie d’un certain multilatéralisme, basé sur la promesse du droit international, la Charte des Nations unies et de nombreuses conventions multilatérales. Il est vrai que cet ordre a toujours été lié aux accords de Bretton Woods de 1945, liés au dollar et au FMI. Mais, en même temps, avec toutes les limitations et le cynisme imposés par la Guerre froide, les Nations unies sont le fruit de négociations entre les alliés victorieux contre le nazi-fascisme. Parrainée par les États-Unis et l’Union soviétique (bien plus tard aussi par la Chine), la Charte des Nations unies aspire à être une « Constitution mondiale » démocratique et pacifique, englobant les droits humains et l’égalité des genres et ethnique, ainsi que l’égalité des États. Ces principes pour un ordre démocratique méritent toujours le soutien des peuples luttant pour leur autodétermination et leur affirmation démocratique.
4. De la violation du droit international à son abolition
La violation de la Charte par les puissances a diminué les Nations unies tout au long de son histoire, en tant que garante de ces principes démocratiques. La doctrine des « guerres préventives », sous prétexte de l’existence (réelle ou fictive) d’armes de destruction massive ou de supposées menaces sur leur sphère d’influence, a conduit les États-Unis, avec l’armée la plus puissante du monde, au record des violations de la Charte (Corée, Vietnam, Grenade, Yougoslavie, Libye, Syrie, Afghanistan...). L’invasion et la dévastation de l’Irak ont été l’apogée de cette barbarie, avec des conséquences à long terme. Cependant, rien n’a plus perturbé la scène internationale que l’extermination et la colonisation continues de la Palestine par l’État d’Israël, sous la bénédiction permanente de la Maison Blanche. Sans négliger d’autres États envahisseurs ou occupants, la Russie (du « socialisme réel » et du capitalisme réel) vient juste après les États-Unis, avec les invasions de la Hongrie, de la Tchécoslovaquie, de l’Afghanistan, de la Tchétchénie, de la Géorgie, de la Crimée et de l’Ukraine.
L’ordre impérialiste a subjugué les principes de l’ONU et les libéraux ne peuvent pas, face aux faits historiques, pleurer la fin d’un ordre de droit international qui n’a jamais existé. Cependant, cette observation ne permet pas la banalisation de la discrétion impériale assumée sous le mandat de Trump et avec son rapprochement avec Moscou.
5. OTAN : instrument de domination nord-américaine, toujours
La continuité de l’OTAN (même en « mort cérébrale », comme dit Macron) permet aux États-Unis de vendre des armes aux pays européens, de maintenir des bases sur le continent et de contrer la pénétration chinoise. Ces dernières semaines, il devient clair, même pour les classes et secteurs politiques qui le nient encore, qu’il s’agit d’une relation impérialiste sans contrepartie, d’un processus d’extorsion sur l’Union européenne et qui subordonne également des pays hors de l’UE (Grande-Bretagne, Norvège). Nous réitérons que l’OTAN n’a jamais été une alliance défensive mais un simple instrument de domination des États-Unis. Le Portugal devrait mettre fin à sa présence dans cette machine militariste, comme le Bloc l’a toujours préconisé.
6. Course aux armements : l’ordre de Trump que l’Europe veut accomplir
Dans la plupart des indicateurs d’équipement, la capacité militaire actuelle des États européens est plus que suffisante pour soutenir la défense territoriale de l’Ukraine ; dans les indicateurs restants, cette capacité prendrait plusieurs années à être atteinte. L’Ukraine est donc un simple prétexte pour une politique de promotion industrielle axée sur les armes comme réponse à la stagnation économique du capitalisme européen.
Harcelé par l’extrême droite, le bloc politique autour d’Ursula von der Leyen — des conservateurs aux verts européens — fait semblant de ne pas comprendre le piège de l’OTAN et fuit en avant sous le slogan du « réarmement » européen. L’accord allemand, entre conservateurs et verts, est particulièrement révélateur. Empêchés de faire 500 milliards d’euros de prêts pour l’armement de l’Allemagne en raison de la règle de la Constitution allemande qui limite la dette publique à un niveau très bas et sans avoir de majorité pour la changer, la CDU et le SPD ont eu recours aux Verts, dont la capitulation n’est guère surprenante, vu le militarisme intense manifesté dans le gouvernement précédent, où ils détenaient le portefeuille des affaires étrangères. Les conservateurs (au Portugal, PSD et CDS), les libéraux (IL), les sociaux-démocrates (PS) et les verts (Libre) constituent un vaste front en Europe pour la dérive militariste, rejoints par Chega, malgré l’opposition au plan de réarmement d’Orban et de l’extrême droite Patriots, au groupe desquels ils appartiennent. Le plan européen, conçu avant même l’élection de Donald Trump, veut des objectifs minimums de dépenses militaires des États membres, totalisant un paquet de 800 milliards d’euros d’investissement, une valeur proche de celle calculée pour financer la neutralité carbone de l’Union européenne. Ce plan d’armement est conçu comme soustrayant des fonds aux fonds de cohésion européens, mais l’essentiel du fardeau retombe sur les États membres, qui devraient s’endetter à cette fin, même s’ils dépassent les limites de déficit et de dette prévues dans les traités. Les dépenses militaires devraient atteindre 3 % du produit intérieur brut, pour monter ensuite au référentiel de 5 % du PIB, comme l’a ordonné Trump. En fait, la plus grande escalade des dépenses militaires sera celle de l’Allemagne, qui vise à être une puissance nucléaire à court terme, tout en adaptant sa force effective aux guerres conventionnelles. La France aura également une forte impulsion. Pour financer ces objectifs, Merz et Macron ont déjà averti que des coupes dans l’État social seront nécessaires.
7. La vulnérabilité européenne n’est pas dans l’armement
Les pays européens membres de l’OTAN, dans leur ensemble, additionnent déjà une dépense militaire 3,5 fois supérieure à celle de la Russie et qui n’est dépassée que par les États-Unis d’Amérique. Comme la guerre en Ukraine, la pandémie de Covid-19 et les épisodes successifs d’ingérence électorale externe l’ont prouvé, la vulnérabilité européenne n’est pas dans l’armement mais dans l’énorme dépendance vis-à-vis des tiers dans les secteurs stratégiques.
Lors de l’invasion de l’Ukraine, la dépendance au gaz russe a retardé et discrédité les sanctions capables de dissuader la guerre. La rupture des chaînes d’approvisionnement pendant la pandémie a révélé les dangers de la dépendance dans des domaines comme la médecine (la grande majorité des substances actives dans les médicaments européens sont produites en Inde et en Chine). Aux épisodes d’ingérence russe et chinoise durant les périodes électorales et à leur soutien à l’extrême droite dans divers États membres via les plateformes Telegram et Tik Tok, s’est maintenant ajoutée l’ingérence explicite de membres éminents du gouvernement américain, comme le vice-président Vance et Elon Musk, ce dernier également propriétaire du réseau social X, tous deux présents en fin de campagne de l’AfD allemande.
Les grands investissements dont l’Union européenne a besoin sont dans son autonomie énergétique et numérique, dans l’alimentation et les médicaments. Reculer dans la transition numérique et désinvestir dans l’innovation et la cohésion est un risque pour la sécurité de l’Europe.
8. L’histoire se répète
Entre 2021 et 2024, les dépenses de défense dans l’UE ont augmenté de plus de 30 %. Les dépenses de défense sans l’OTAN étaient de 326 milliards d’euros, selon le Conseil européen (certains think tanks mentionnent 440 milliards).
Quelques jours après l’invasion de l’Ukraine, la présidente de la Commission européenne a déclaré que l’Europe avait avancé davantage en termes de sécurité et de défense en six jours que durant les deux dernières décennies : une augmentation sans précédent des dépenses militaires européennes, avec de l’argent provenant directement du budget communautaire.
En 2023, les États membres de l’UE ont délivré 33 700 licences pour les exportations d’armes, représentant le quart des exportations mondiales. La France seule a augmenté de 47 % ses exportations et est devenue le deuxième plus grand exportateur au monde, dépassant la Russie.
Ces dernières années, l’UE a lancé plusieurs projets de défense :
— Programme européen de développement industriel de la défense (EDIDP).
— Action préparatoire sur la recherche en défense (PADR).
— Fonds européen de défense (EDF).
— Loi européenne de renforcement de l’industrie de défense par l’achat commun (EDIRPH).
— Action de soutien à la production de munitions (ASAP).
— Stratégie européenne de l’industrie de défense (EDIS).
— Programme européen de l’industrie de défense (EDIP).
Le Fonds européen de soutien à la paix lui-même, qui est en dehors du budget européen, a été utilisé pour acheter des armes pour des pays en guerre (Ukraine, Rwanda, Niger).
Une étude de 2025 de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI) indique que deux tiers des armes achetées par les pays européens proviennent maintenant des États-Unis. Les armes importées des États-Unis ont plus que doublé entre 2020 et 2024. Malgré les appels à réduire la dépendance vis-à-vis des États-Unis et à renforcer l’industrie européenne, les pays européens se sont précipités pour acheter de l’armement nord-américain. Pour la première fois en deux décennies, les armes nord-américaines ont afflué davantage vers l’UE que vers le Moyen-Orient. Tout cela dans la période où l’UE a investi sans précédent et a le plus appelé au renforcement des capacités européennes.
Dans la semaine suivant l’annonce de Von Der Leyen, les sociétés multinationales de guerre ont vu leur capitalisation boursière augmenter de 35 milliards d’euros. Il est clair qui bénéficie de cette remilitarisation.
Il y a des bases militaires nord-américaines sur tout le territoire européen. Il y a des ogives nucléaires nord-américaines sur le territoire européen. Mais à ce sujet, pas un mot sur « l’autonomie européenne ». Au contraire : le président polonais Andrzej Duda a fait appel à Trump pour transférer les ogives nucléaires nord-américaines installées en Europe occidentale vers la Pologne et l’Europe de l’Est. Ce qui est sur la table, c’est un nouveau modèle d’intégration européenne qui combine le constitutionnalisme du marché avec une identité politique basée sur la force militaire.
9. Coopération non-alignée
Le Bloc de Gauche s’oppose à l’augmentation des dépenses d’armement et à la dérive militariste que cela préfigure. Le Bloc de Gauche préconise des politiques de coopération volontaire entre États européens démocratiques à des fins de sécurité et de défense. Cette vision nous éloigne de la perspective de toute armée européenne, que les élites elles-mêmes rejettent, tel est le risque qu’impliquerait la simple installation d’un commandement militaire qu’aucune démocratie ne contrôle, ou dans lequel prédominent des gouvernements qui peuvent être dirigés par l’extrême droite dans un avenir proche.
10. Occident en turbulence et géométries variables
La géométrie des alliances en formation est sans précédent. Lors du récent Sommet de Londres, l’Angleterre, la Norvège, le Canada et la Turquie ont reçu onze pays de l’UE : France, Allemagne, Espagne, Italie, République tchèque, Roumanie, Danemark, Pays-Bas, Pologne, Finlande et Suède. Cette « communauté de défense » ad hoc n’est pas pilotée par l’OTAN, ni par l’UE — bien que les deux la suivent de près. Il est prévisible que cette géométrie variable d’alliances se développe face à la pression russe et à la distanciation des États-Unis, qui affirment le mépris pour l’autodétermination du peuple du Groenland (dont ils ont l’intention d’acheter le territoire au Danemark) ou le non-respect de l’indépendance canadienne, suggérant une annexion. La présence de la Turquie au Sommet de Londres, sans présence grecque, indique également une plus grande autonomie vis-à-vis des États-Unis.
11. Mondialisation « multipolaire », le régime des puissances
Sous le slogan du « monde multipolaire », les puissances impériales cherchent à consolider un régime de sphères d’influence, en articulation instable avec des impérialismes secondaires et régionaux. Ce régime de puissances est très similaire à celui qui a accompagné la montée du fascisme jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. L’histoire ne se répète pas, mais elle enseigne. Nous devons empêcher l’escalade de la terreur. Au lieu de cela, l’Europe choisit la voie militaire pour se tenir côte à côte dans la dispute mondiale.
Le régime des puissances privilégie la négociation bilatérale — le « transactionnalisme » trumpiste — au détriment des règles fixées dans les accords multilatéraux. L’Union européenne elle-même fait déjà partie de ce régime. Elle maintient l’accord d’association avec Israël et finance le régime génocidaire de Netanyahou, tout en assurant des échanges commerciaux qui incluent la production dans des territoires illégalement occupés. Elle finance la guerre au Congo par l’accord commercial avec le Rwanda, de qui elle achète des ressources pillées au Congo avec des armes achetées en euros. Et elle continue d’acquérir auprès du Maroc les ressources du Sahara occidental (malgré la sentence de la Cour de justice de l’Union européenne qui a considéré les accords nuls), tout en légitimant l’occupation illégale en échange de la signature marocaine sur des accords pour déporter des migrants.
Le régime des puissances privilégie la liquidité de la transaction sur tout engagement envers l’intérêt général, les droits humains et les écosystèmes, accentue le risque de guerre aux périphéries des zones d’influence, tout en renvoyant le conflit ouvert entre puissances à un statut exceptionnel, même en raison des risques existentiels impliqués. Le régime des puissances est la coalition mondiale pour le carbone, en ligne avec le négationnisme néofasciste, poussant l’UE et le monde à abandonner même de timides intentions concernant la transition énergétique.
12. Responsabilités européennes dans le malheur ukrainien
La guerre en Ukraine est dans l’impasse depuis longtemps. Bien avant que le trumpisme ne dicte les règles, les lignes de front bougeaient peu, toujours avec un nombre élevé de morts des deux côtés. L’Union européenne, qui a à juste titre aidé l’Ukraine à résister à l’invasion barbare, n’a jamais voulu confronter la Russie avec des pourparlers de cessez-le-feu. Elle a répété le discours de Biden sur la « défaite de Moscou » et a collaboré à une stratégie de prolongation de la guerre visant à user la Russie. Cette passivité diplomatique européenne a laissé la sortie aux mains de Trump, par le pillage. Le partage de l’Ukraine et de ses minéraux suivra le tracé des tranchées, bénéficiant à l’envahisseur et pillant l’envahi, auquel seront imposés des dirigeants collaboratifs. Zelensky est pressé de capituler, de se retirer des négociations ou de signer aveuglément et de quitter la scène. La volonté du peuple ukrainien, ne compte déjà pour rien.
La « communauté de défense » promue à Londres promet d’installer et de fournir des forces sur le territoire ukrainien libre de l’occupation russe. Le Bloc de Gauche rejette toute participation portugaise à la mission de stabilisation du partage et du pillage de l’Ukraine entre Trump et Poutine, même si elle est étiquetée comme force de maintien de la paix.
13. L’Ukraine doit être indemnisée
Trump veut l’Union européenne dans les négociations avec la Russie après le cessez-le-feu, pour lever les sanctions sur les oligarques et normaliser le commerce russe en Europe, incluant également le retour des actifs gelés et saisis à la Fédération de Russie. Trump veut empêcher que 160 milliards d’euros actuellement gelés soient remis à l’Ukraine pour la reconstruction des infrastructures. De son côté, il a le système financier, qui craint que la confiance dans l’euro ne soit ébranlée par la confiscation de l’argent russe. La remise de cet argent à l’Ukraine, comme proposé par le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, serait le moyen le plus efficace de contraindre Poutine.
14. Seule une paix juste peut durer
Le Bloc de Gauche a toujours été d’accord avec l’envoi d’armes défensives pour la résistance légitime de l’Ukraine. De même, nous continuons à défendre l’intégrité du territoire ukrainien de 2022, les négociations pour un cessez-le-feu et le retrait des troupes russes. Une paix juste et durable doit être basée sur la neutralité de l’Ukraine et l’annulation de sa dette, ainsi que sur la reconnaissance de sa diversité nationale et le droit des populations qui habitaient le Donbass au moment de l’invasion russe à se prononcer sur leur avenir. Face à l’accord Trump-Poutine, l’Union européenne doit prendre une position indépendante.
15. Le droit à l’autodétermination n’a pas de double standard
Le principe d’autodétermination des nations est fondamental dans le droit international, première aspiration de tous les peuples. Cette compréhension est bien présente au Portugal, car nous avons vécu la décolonisation des pays africains après une guerre injuste d’occupation, et la solidarité pour l’indépendance du Timor. En ce sens, le Bloc de Gauche ne classe pas les conflits pour l’autodétermination comme des « guerres par procuration », indépendamment de l’intervention d’acteurs internationaux étrangers aux peuples opprimés. Par conséquent, sauf pour les grandes différences historiques, nous utilisons le même critère en Ukraine ou en Palestine ou dans les nations sans État en territoire espagnol, au Sahara, au Kurdistan.
16. Palestine, drapeau de l’humanité contre la barbarie
Avec la couverture des États-Unis et de la plupart des pays européens, Israël promeut le génocide à Gaza, l’invasion de la Cisjordanie et des agressions sur les pays voisins. Trump et Netanyahou, avec leurs alliés régionaux, cherchent à encercler et neutraliser l’Iran. Ces facteurs conduisent à une instabilité accrue au Moyen-Orient, précisément l’une des périphéries des puissances.
Le Bloc de Gauche s’allie aux campagnes internationales pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions contre l’apartheid israélien et défend un accord qui garantit la paix en Palestine, la fin de l’occupation et le respect des résolutions de l’ONU. La démilitarisation d’autres conflits est attendue, notamment celui qui se déroule en Syrie, sous les auspices des pays du sud global, dans le respect de l’auto détermination des peuples.
17. L’internationalisme désobéit à tous les empires
Il est nécessaire de conclure que l’impérialisme du 21e siècle modifie sa dynamique et sa corrélation de forces. L’impérialisme américain reste le plus agressif et constitue une superpuissance que d’autres puissances impérialistes cherchent à combiner avec l’existence de pôles mondiaux. Ce processus avance, tantôt par le conflit, tantôt par la coopération entre puissances et par l’intégration capitaliste transnationale. Il y a plusieurs impérialismes dans le système mondial et aucun d’entre eux n’aura un rôle progressiste car tous agissent selon les intérêts de leurs élites capitalistes. Reconnaître cette réalité est vital pour élaborer une proposition internationaliste capable d’offrir un avenir à l’humanité et de concevoir un ordre démocratique des peuples. o
* Le Bloc de Gauche est une organisation politique au Portugal.
Résolution approuvée le 23 mars par le Conseil national du Bloc de Gauche. -
Trump : l’économie au service de la politique impériale...
Révision en baisse des prévisions de croissance, inflation, soubresauts de Wall Street, incertitudes sur le commerce extérieur… Cela n’ébranle pas les certitudes de Trump qui affirme que ce n’est qu’un mauvais moment à passer avant que ne chantent les lendemains de la grande Amérique. La rédaction de cet article a été terminée le 28 mars ; il n’intègre donc ni les plus récentes décisions douanières de Donald Trump, ni les réactions des marchés financiers et des « partenaires commerciaux » des États-Unis.
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Comprendre le monde pour mieux combattre le système...
https://lanticapitaliste.org/agir/politique/revue-ndeg165-trump-saigneur-du-monde
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Ni pacifisme ni union sacrée...
Le 8 mai, chaque année ou presque, est l’occasion pour les commentateurs de parler des décennies de paix qui ont suivi la capitulation et la fin des hostilités en Europe en 1945.
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Défendre l’indépendance du Groenland, le peuple et la nature groenlandais...
Avec les demandes répétées de Donald Trump pour que les États-Unis s’emparent du Groenland et les commentaires de son vice-président, J. D. Vance, sur le nombre de militaires américains au Groenland, la compétition impérialiste pour le Groenland a franchi une nouvelle étape décisive.
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Allemagne : Le gouvernement Merz-Klingbeil ou le trumpisme light...
La dernière variante du GroKo (Grosse Koalition, la grande coalition) avec Merz comme chancelier et Klingbeil (SPD) comme vice-président, veut, selon l’accord de coalition, représenter « la responsabilité pour l’Allemagne ». Traduit de la novlangue politique, cela signifie que le montant des profits est intouchable.
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Communiqué du Bloco de Esquerda au Portugal sur la panne du 28 avril...
Le Bloc de gauche a toujours considéré le système électrique comme une question de sécurité nationale. Le 28 avril, le pays tout entier a pu constater à quel point c’est vrai.
Le Bloc de Gauche remercie publiquement les travailleurs du service public et tous ceux qui ont contribué à ce que la normalité soit possible hier.
Quant à ceux qui n’ont pas pu se rendre à leur travail, la loi stipule que si le transport n’est pas disponible, l’absence est considérée comme justifiée. Il est juste qu’en plus, le salaire de ces travailleurs ne soit pas réduit.
Le Bloc de gauche a toujours considéré le système électrique comme une question de sécurité nationale. Hier, tout le pays s’est rendu compte à quel point c’était vrai. Les risques liés à une interruption généralisée de l’approvisionnement en électricité sont énormes. Une infrastructure critique comme celle-ci doit être sous contrôle public et sous pleine surveillance : même si la nationalisation du réseau électrique ne suffit pas à éliminer tous les risques, il n’en reste pas moins que la propriété du réseau électrique par des intérêts privés, qu’ils soient privés ou détenus par un État étranger (comme c’est le cas unique au Portugal), constitue en soi un risque énorme.
Ces dernières semaines, le Bloc a soulevé cette question, tant dans les débats télévisés que dans sa réponse au Rapport annuel sur la sécurité intérieure pour 2024, qui admet en termes clairs la menace que représente la privatisation des actifs stratégiques : « la présence d’opérateurs et de fournisseurs étrangers, considérés comme risqués, dans les infrastructures critiques et les secteurs stratégiques nationaux méritait une évaluation préventive d’une menace pour la sécurité intérieure ».
Outre cette question, il est essentiel de déterminer les responsabilités éventuelles de la REN dans la panne d’électricité au Portugal. En plus de connaître l’origine du problème en Espagne, il est nécessaire de clarifier si REN (Redes Energéticas Nacionais) a respecté tous les protocoles de prévention auxquels elle est tenue et si toutes les réserves prévues ont été correctement activées. Tous les détails techniques relatifs à cet événement devraient être publiés par REN afin qu’ils puissent être examinés ouvertement, en commençant par le Parlement.
Nous ne ferons pas campagne après hier. Mais cette journée devrait être étudiée par toutes les institutions publiques, les agents économiques et le prochain gouvernement. Des défaillances majeures se sont produites à différents niveaux : dans les systèmes énergétiques sanitaires, dans les communications d’urgence de l’INEM (Instituto Nacional de Emergência Médica), dans l’approvisionnement en eau, dans l’accès aux biens de première nécessité avec la fermeture des grands magasins (seulement garantie par les petits commerces et les épiceries). En particulier, le gouvernement a échoué dans sa communication – qui a commencé par des informations erronées et a pris trop de temps pour être utile.
Même si nous évitons de nouvelles pannes à l’avenir, les défaillances du système électrique devraient devenir plus fréquentes en raison du changement climatique et des événements extrêmes (incendies, tempêtes, inondations). Le Portugal doit disposer d’un plan d’intervention et de communication d’urgence, comprenant des systèmes de générateurs et de stockage de secours dans les services publics essentiels et les bâtiments publics (tels que les écoles) qui pourraient servir d’appui aux populations.